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SANDRE

L’eau qui dort

Monologue implacable, Sandre est avant tout la parole d’une femme qui a basculé et a commis un acte irréparable : celui de l’infanticide. Il s’agit bien là d’une tragédie, une de ces histoire où le destin semble prendre le pas sur le libre-arbitre des êtres. Une tragédie des temps modernes qui rappelle l’affaire des bébés congelés et celles qui ont suivi, mettant en lumière, à l’époque des faits, le concept de déni de grossesse.

Solenn Denis, auteure du texte, voulait redonner la parole à ces femmes infanticides, non pas pour les excuser ni leur enlever toute responsabilité, mais pour réfléchir à un sujet tabou. Egalement metteure en scène du spectacle avec le concours du Collectif Denysiak, elle confie ce rôle difficile à un comédien, Erwann Daouphars absolument époustouflant.  Ce parti pris est bien vu car il permet aux spectateurs d’avoir la distance nécessaire pour entendre l’inconcevable. C’est ainsi qu’Erwann Daouphars, tout en nuances, avec une sobriété qui en devient petit à petit anxiogène, livre le parcours de vie de cette femme qui se dit elle-même normale : son mariage, ses enfants, sa petite vie tranquille, son mari qu’elle aime tant mais qui, lui, ne l’aime plus. Pourquoi bascule-t-elle ? Lorsque celui-ci lui annonce qu’il va la quitter, nous sommes face à une épreuve de la vie on-ne-peut-plus banal. C’est pourtant là que le bas blesse. Solenn Denis et Erwann Daouphars nous donnent à entendre une parole confisquée, tue. Une parole qui ne s’est pas élevée contre les petites humiliations quotidiennes, qui est restée en sourdine et à laquelle on donne un espace très restreint (le comédien est d’ailleur juché sur un piedestal d’environ un mètre carré tout au lond du spectacle). Cet abandon, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Et effectivement, à ce moment là, lorsque le cri se libère, tout prend l’eau : plancher, fauteuil. Même le lampadaire se met goutter et chaque impact de goutte sur le guéridon semble être un  compte à rebours avant explosion. Ce sont aussi toutes les larmes que cette femme ne versera pas, murée dans le traumatisme de son acte ; son acte qu’elle ne comprend pas.  Son humanité, comme sa voix, vient de lui être confisquée. Elle essaie de se raccrocher aux branches. En vain. Il est trop tard. Son sang a viré au noir. La femme est devenue monstre, ogresse. Il y a quelque chose de la dévoration dans son acte. On finit par comprendre, qu’en tuant son enfant,  elle tue avant tout sa rivale dénommée Sandrine, tronquant le prénom de celle-ci comme on coupe en deux un bout de viande, afin de le donner à son bébé.  Sortira-t-elle jamais de ce labyrinthe psychique?  La fable ne le dit pas, mais elle nous laisse entendre que la monstruosité d’un être peut aussi tenir à sa souffrance.
Un spectacle nécessaire, dérangeant, sublime dans sa direction d’acteur. A voir.

SANDRE
Texte : Solenn Denis ( Editions Lansman)

Interprétation : Erwann Daouphars
Mise en scène : Collectif Denisyak
Crédit photo: Marie-Elise Ho-Van-Ba

Tournée :

Du 9 au 10 octobre 18 : St Gratien. Centre Culturel du forum ( à confirmer)
Du 25 au 28 octobre 18 ; La Roche sur Foron- Festival Eclats de  scène ( à confirmer)
13 au 16 novembre 18 : Bruxelles – Théâtre
17 novembre 18 : Eghezee (BE) – L’Ecrin.
29 Novembre 18 : Poligny – La Chapelle de la Congrégation
1erdécembre 18 : Neuves-Maisons- Centre culturel
29 janvier 19 : Agen – Théâtre ( à confirmer)
31 janvier au 5 février 19 : Théâtre d’Aurillac ( à confirmer)
8 et 9 février 19 : Limoux et Pennautier- ATP de l’Aude ( à confirmer)
12 février 19 : Théâtre des Bergeries-Noisy le Sec
8 mars 19 : Oyonnax- Centre Culturel Aragon ( à confirmer)
14 et 15 mars 19 : Théâtre des Deux Rives. Charenton
19 mars 19 : Courbevoie – Espace Carpeau
26 mars 19 : Oloron Ste Marie-Espace Jeliote
28 mars 19 : Vallauris- Le Minautaure.

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