Photo 2 © Clara Pauthier

JAZ

Alexandre Zeff met en scène le beau texte de Koffi Kwahulé à la Chapelle du Verbe Incarné. Celui-ci parle d’un sujet délicat : le viol, mais surtout d’un parcours de résilience, celui de la femme –Jaz- victime de ce crime. Pour incarner ce personnage, le metteur en scène a choisi une comédienne lumineuse avec une palette de jeu considérable et un talent certain pour le chant : Ludmilla Dabo.

Jaz est une jeune femme qui vit seule dans une cité. Elle est libre, belle et suscite des regards obliques. Un jour, un voisin la coince dans des toilettes et la viole. Jaz nous raconte sa vie, son agression, sa reconstruction. Jaz tente d’aller vers la lumière et de nous emmener avec elle.

La mise en scène efficace et puissante d’Alexandre Zef s’appuie sur une scénographie astucieuse et évolutive, faite d’un bloc encadré de néons, transformable en fauteuil, en toilettes ou en scène. Un groupe de musiciens accompagne la comédienne Ludmilla Dabo absolument formidable.
Celle-ci, après avoir entonné un air de jazz, tour à tour féminine et féline devient soudain virile : sa voix change, devient celle d’un homme – on comprend vite qu’il s’agit d’une voix enregistrée mais l’effet est saisissant- et nous laisse entrevoir l’agresseur. Sa capacité à muer en divers personnages est impressionnante. La comédienne nous livre petit à petit l’histoire de Jaz. Elle distille avec la majesté d’une femme invaincue l’épreuve par laquelle celle-ci est passée ; son traumatisme. La musique apporte une atmosphère spéciale à cette prise de parole. Tout est dans la variation, le non-dit ; ce qui est suggéré. Le jazz est l’âme de Jaz ; quelque chose qui résiste envers et contre tout, qui se tient droit et traverse le temps et l’espace, se modifie, s’adapte, comme pour maintenir une ultime chance de survie. Lorsque la comédienne se met à chanter, on sent qu’elle convoque bien plus que l’histoire de Jaz, cette femme violentée et meurtrie. Sa voix grave et puissante monte d’un abyme de douleurs, sans doute les frères de cette dernière qui furent jadis esclaves et qui chantaient le godspel dans les champs de coton.
Ainsi, en mettant sur scène un groupe de musiciens, le metteur en scène élargi le propos et propose la mise en miroir d’une histoire individuelle avec une histoire collective. C’est subtil, beau et nécessaire. A voir.

Jaz de Koffi Kwahulé
Mise en scène : Alexandre Zeff
Avec Ludmilla Dabo et les musiciens du Mister Jazz Band : Frank Perrolle, Gilles Normand, Louis Jeffroy et Arthur de Ligneris.
Scénographie et Lumière : Benjamin Gabrié
Création sonore : Antoine Cadou

Durée : 1h05

Du 7 au 30 juillet 2017 à 19h. Relâches les 13, 20 et 27 juillet.

Chapelle du Verbe Incarné
216 rue des Lices
84000 Avignon

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